Rochefort et son compagnon Vermeulen passèrent devant eux laissant bien en vue les canons de leurs armes. Depuis plus rien. Même pas un oiseau. Comme si le monde était mort tout autour. Quand ils arrêtaient le moteur quelques minutes pour boire un peu d’eau tiède et dégourdir leurs jambes, le silence les recouvrait, un silence hallucinant, profond. Ils entendaient le calme après le bruit du camion. Le chant des grillons n’était pas du bruit, c’était le silence africain.
Meg is hallgathatod:
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— Si nous avançons aussi bien, nous serons chez nous entre 5 et 6 heures de l’après midi !
Rochefort était satisfait. 400 kilomètres en douze heures sur une route pareille, avec un poids lourd, n’était pas si mal.
— Ce n’est pas l’autoroute, répondit Vermeulen en faisant des mouvements d’assouplissement. Mon dos est en compote, et il reprit la bouteille d’eau tiède.
— Il nous reste assez d’eau, demanda Rochefort devant le capot ouvert.
— Oui. Deux jerrycans. Pourquoi ? Il en faut pour le moteur ?
— Non, pas du tout. Pour boire.
— Tu ne veux pas manger ? Il y a des rations, tu sais !
— Plus tard, à midi passé, et il regardait le soleil encore caché par les arbres. En laissant retomber le capot Rochefort avait l’air préoccupé.
— Qui a-t-il ? Vermeulen scrutait le visage de son ami en déplaçant la courroie de sa mitraillette sur l’autre épaule.
— Le pont. Sur le Lualaba ? Faut-il le traverser ?
— Si nous voulons aller à Kabalo, oui.
— Mais ils nous ont expliqué à Kamina qu’il était en bon état. Les rebelles ne l’ont pas fait sauter.
— Je sais. Logiquement il n’y a aucun problème. Tout simplement ce n’est pas un pont routier.
— Quoi alors ?
— C’est un pont du chemin de fer, répondit Rochefort. Et sa traversée avec notre camion sera compliquée. Je ne l’ai jamais vu et on m’a dit qu’il était long. Il faut emprunter la route qui traverse la ligne et suivre la voie sur le ballast.
— Pourquoi ne me l’as-tu pas dit avant le départ ? Vermeulen donna un coup de pied dans le double pneu arrière.
— Je ne voulais pas t’énerver. Il faut revenir avec le camion et il n’y a pas d’autre solution. Ou bien nous rentrons comme nous sommes venus, en avion. Veux-tu retourner à la base ?
— Non, bien sûr que non. Tu penses que la traversée est faisable ?
— Oui. Pas facile mais faisable, répondit Rochefort et il regarda l’heure.
« Il faut y aller, il est plus de dix heures. »