Le 8 mars 1857, des ouvrières américaines du textile auraient manifesté en masse pour la reconnaissance de leurs droits… Sauf que … cette manifestation n´a probablement jamais eu lieu, dit-on. Peu importe, il n´en fallut pas davantage pour que l´ONU décrétât en 1977 cette date „Journée internationale (des droits) des femmes”. Bien avant, des „Journées de la Femme” avaient été instituées un peu partout: aux Etats-Unis en 1909, suivies par l’Internationale socialiste en 1911, reprises en Union soviétique en 1921, puis dans les pays du bloc sur la fin des années quarante (Hongrie: 1948), enfin en Belgique en 1972. Sans oublier les Journées des ouvrières tenues dès avant la Première Guerre, dont la plus mémorable s´est tenue à Berlin le 8 mars 1914, journée de revendications, les femmes réclamant notamment le droit de vote. Journée qui va donc être célébrée un peu partout (… ou presque) ce 8 mars. Dans la plupart des cas rebaptisée „Journée de la Femme”, cette célébration, sans renier sa motivation d´origine, est surtout devenue une occasion de célébrer le rôle de nos compagnes dans la création en général (musicale, artistique, littéraire, scientifique, cinématographique et mille autres domaines).
Berlin, 8 mars 1914
Il n´est bien évidemment pas question de citer ici leurs noms qui occuperaient un volume entier, de George Sand à Camille Claudel, de Margit Kaffka à Magda Szabó, de Marie Curie à Katalin Kariko (1) et mille autres… Rien que dans le seul domaine de la création et de l´interprétation musicales, on les compte par dizaines, voire davantage (2. Nous nous bornerons à évoquer quelques manifestations montées à cette occasion. Tout d´abord l´Institut français de Budapest qui nous propose jusqu´au 10 mars, sous le titre „Femmes derrière la caméra” („Nők a kamera mögött”), la mise en ligne de trois longs métrages et un documentaire sous-titrés en hongrois, réalisés par des jeunes scénaristes françaises (entre 30 et 40 ans). Angèle et Tomy, d´Alix Delporte, Le Beau Monde de Julie Lopes Curval, La Cour de Babel de Julie Bertucelli, enfin Tout est pardonné de Mia Hansen Løve. L´Institut culturel hongrois de Paris n´est pas en reste, nous proposant la mise en ligne du chef d´oeuvre de la réalisatrice et scénariste Márta Mészaros „L´Adoption”. A signaler au passage la présence d´une actrice française, Isabelle Huppert, dans le rôle principal d´une autre grande réalisation „Les Héritières”. Par ailleurs, sera montée en Hongrie une „Nuit de la Femme” (Nők éjszakája Fesztivál) qui débutera dès la veille au soir, proposant une grande variété de manifestations en ligne, telle une visite virtuelle du Musée national axée sur le thème de la femme artiste, ou encore la projection de films réalisés par des femmes ou consacrés à la femme. Au-delà, il n´est pas jusqu´à la chaîne Mezzo qui, sous le concept „Women in music” diffusera du 6 au 26 mars non moins de cinquante programmes dédiés au rôle des femmes dans la musique classique et le jazz, ou encore dans la danse. Comme l´on voit, un hommage aux femmes qui sera donc largement célébré.
Nuit de la Femme (Hongrie, 7-8 mars)
Certes, mais il reste encore beaucoup à faire... Notre propos n´est pas de traiter ici un sujet bien trop vaste qui a fait couler des tonnes d´encre. Rappelons juste un chiffre fourni par l´ONU. Si, en 2014, 156 États avaient inscrit les droits de la femme dans leur constitution, 52 autres ne l´ont pas encore fait à ce jour. Ou encore, sur les 197 États reconnus par l´ONU, seule une petite vingtaine ont une femme à leur tête ou à la tête de leur gouvernement. Par ailleurs, l´Union interparlementaire nous rappelle que les femmes constituent moins du quart des élus de par le monde (30% dans les Amériques, 28,5% en Europe, mais 18% au Moyen Orient). Quant au droit de vote, si de nombreux États l´avaient déjà accordé aux femmes bien avant la Guerre - 1918 dans la Hongrie du comte Károlyi, voire en 1930 dans la Turquie d´Atatürk -, il fallut attendre le général de Gaulle pour qu´il le leur accordât à la Libération.
Mais encore une fois, loin de nous la prétention d´aborder ici un sujet qui dépasse largement le cadre de notre propos et notre compétence. Notre souhait se bornant, par ces quelques lignes, à rappeler l´hommage qui leur sera rendu ce 8 mars. Mais pourquoi seulement le 8 mars? A vrai dire, tous les jours de l´année. Elles le méritent bien…
Pierre Waline, 1er mars 2021
(1): chercheuse hongroise à l´origine des vaccins à ARN anti-Covid.
(2): cf. paru dans ces colonnes „Le rôle des femmes dans la musique (trop vite et injustement oubliées)”, 8 mars 2020.